Comptabilité Carbone : Un Aperçu
La comptabilité carbone est un thème d’actualité très prisé actuellement. Pas plus tard que ce mois-ci :
- InfraNum, fédération qui gère le développement des infrastructures numériques et partenaire de la connectivité des territoires, s’allie avec ADEME. L’objectif est de créer un nouveau référentiel sectoriel intitulé « Bilans carbone des infrastructures numériques ». En fait, il s’agit d’évaluer le bilan carbone pour effectuer un diagnostic environnemental de la filière.
- Ou encore, l’actualité a porté sur la start-up Traace, créateur de logiciels de développement durable. Cette entité fait désormais partie du groupe Tennaxia, spécialiste du pilotage ESG et RSE. L’intérêt ici est de créer un groupe dans les logiciels de développement durable à l’échelle européenne.
Comprendre la comptabilité carbone
Avant tout, les considérations ESG sont des facteurs désormais intégrés dans la stratégie des acteurs que sont les organisations et les investisseurs.
Dans ce contexte, la comptabilité carbone tient une place essentielle pour évaluer l’impact environnemental.
Définition de la comptabilité carbone
En effet, la comptabilité carbone, également connue sous le nom de comptabilité des gaz à effet de serre (GES), est un outil qui permet de :
- Mesurer
- Quantifier
- Rendre compte
des émissions de gaz à effet de serre (GES).
Ainsi, ces gaz trouvent leur source dans l’activité humaine provenant d’une entité (organisation, territoire) :
- Soit, directement via sa consommation d’énergie
- Ou soit indirectement au travers de sa chaine logistique.
De plus, l’émission de gaz peut aussi provenir d’un individu.
Plus précisément, la comptabilité carbone vise des gaz bien spécifiques à savoir :
- Le dioxyde de carbone (CO2)
- Le méthane (CH4)
- Le protoxyde d’azote (N2O)
- Et les gaz fluorés (F-gaz)
Intérêt de la comptabilité carbone
De ce fait, la comptabilité carbone permet de :
- Identifier les sources d’émissions de GES
- Fournir une évaluation de l’empreinte carbone d’une organisation.
A cette fin, elle est tenue de réduire cette empreinte. De surcroit, elle doit également prendre des mesures visant à lutter contre le réchauffement climatique.
Importance de la comptabilité carbone
La comptabilité carbone est un outil stratégique pour les organisations qui visent à mettre en place des stratégies durables. De ce fait, celles-ci sont en mesure de :
- Mesurer l’impact environnemental de leurs activités
- Mettre en place un plan de transition énergétique
Autrement dit, la comptabilité carbone est un outil qui leur permet de prendre des décisions éclairées en vue de réduire les émissions de GES.
Cette position s’inscrit dans la lutte contre le réchauffement climatique. Par conséquent, en adoptant les bonnes mesures, l’organisation réduit son risque réputationnel en la matière renforçant par la même son image d’une entreprise citoyenne.
Principaux référentiels de la comptabilité carbone
Pour ce faire, les entreprises se réfèrent à une méthodologie. Au niveau international, il y a le GHG Protocol et la norme ISO 14064. En France, le référentiel utilisé est le bilan carbone ADEME.
GHG Protocol
Au niveau international, la méthodologie la plus utilisée se prénomme le Greenhouse Gaz (GHG) Protocol. Ce référentiel se décompose en trois scopes :
- Scope 1 : les émissions directes
- Scope 2 : les émissions indirectes : la consommation d’énergie
- Scope 3 : les émissions indirectes : la chaine de valeur
En premier lieu, il y a le scope 1 : il traite des émissions directement issues de l’activité des entreprises. Par exemple, il inclut le transport des marchandises ou encore les processus industriels.
Mais, il existe également des émissions indirectes. Ainsi, selon le scope 2, les émissions indirectes peuvent émaner de la consommation d’énergie telle que l’électricité ou la chaleur achetée par l’organisation. De même, selon le scope 3, il existe des émissions indirectes de GES générées à travers la chaîne de valeur de l’organisation y compris celles émanant des fournisseurs et des clients. A ce titre, on peut citer le transport des fournisseurs, les déplacements des employés ou encore la gestion des déchets de produits en fin de vie.
Aussi, les organisations doivent gérer une situation complexe. En effet, selon ce référentiel, la maîtrise des émissions de GES est plus facile au niveau de l’activité de l’organisation stricto sensu, soit les scopes 1 et 2 que lorsque l’on se réfère à son environnement : scope 3. Or, c’est à ce niveau-là que les émissions sont les plus importantes.
Norme ISO 14064
La norme ISO 14064 est un ensemble de normes internationales qui définit les principes et les méthodes pour quantifier, vérifier et déclarer des émissions et des suppressions de gaz à effet de serre (GES). Elle est utilisée pour évaluer et réduire l’empreinte carbone des organisations.
La norme ISO 14064 définit trois catégories d’émissions :
– La norme ISO 14064-1 : émissions directes liées à l’activité de l’entreprise (par exemple, émissions de CO2 des centrales électriques). Le contenu de la norme ISO 14064-1 se fonde sur le Protocole des gaz à effet de serre (Protocole GHG). Elle permet la rédaction d’un rapport pour rendre compte des efforts accomplis en matière de quantification des gaz à effet de serre. Est concerné tout organisme, public ou privé.
– La norme ISO 14064-2 vise les projets. Cette norme peut être utilisée pour enregistrer l’élimination des gaz à effet de serre ou la réduction des émissions.
– La norme ISO 14064-3 se concentre sur la comptabilisation du dioxyde de carbone, le CO2. Elle corrobore les déclarations liées aux GES.
Des organismes de certification accrédités tels que Bureau Veritas ou SGS délivrent la certification ISO 14064. Ainsi, ils permettent d’attester que l’organisation a bien mis en place un système de gestion des émissions de GES conformément à la norme ISO 14064.
Bilan carbone
Le bilan carbone est un outil de comptabilisation des émissions d’effet de serre mis en place par l’ADEME : l’Agence française de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, créée en 2004. Cet organisme prend en compte les scopes 1, 2 et 3 du GHG Protocol.
Plus précisément, les deux premiers scopes sont obligatoires tandis que le scope 3 est recommandé.
En France, selon l’article L229-25 du Code de l’environnement, le bilan carbone de l’ADEME est obligatoire pour :
- Les services de l’Etat
- Les collectivités territoriales de plus de 50 000 habitants
- Les établissements publics et autres personnes morales de droit public de plus de 250 agents
Ces organismes doivent ainsi effectuer un bilan carbone tous les 3 ans.
Sont également concernées :
- Les personnes morales de droit privé employant plus de 500 personnes (250 dans les régions et départements d’outre-mer)
La réalisation du bilan carbone s’effectue tous les 4 ans
Dans tous les cas, le bilan carbone se transmet par voie électronique sur la plateforme Bilans GES de l’ADEME. Il reste disponible au public.
Sinon, il reste optionnel pour les autres entités. Néanmoins, il est vivement recommandé eu égard à la nouvelle directive CSRD en application dès le 01 janvier 2025.
Portée de la mise en pratique des référentiels
Principe sous-jacent
Ces différentes méthodologies ont pour point commun de mesurer l’impact GES par une conversion en CO2 ce qui permet d’obtenir une évaluation du réchauffement climatique. Et en conséquence, les entreprises peuvent jauger de l’efficacité des mesures prises en vue de réduire les émissions de GES.
En cas de non-respect de ces référentiels, les organisations sont certaines d’encourir un risque réputationnel associé à un risque de perte de confiance des parties prenantes. Eventuellement, elles peuvent aussi s’exposer à des sanctions et à des amendes.
Importance des avancées technologiques
Aussi, pour se conformer à ces référentiels, les entreprises peuvent s’appuyer sur de substantiels développements technologiques. En effet, il est notamment question de l’essor de l’intelligence artificielle et des nombreuses applications liées à la technologie blockchain et à l’Internet of Things (IOT).
Aussi, ces avancées modifient la manière dont les organisations collectent, analysent et intègrent les données sur le développement durable dans les états financiers. Par exemple, les organisations peuvent ainsi utiliser des technologies comme la blockchain pour renforcer la transparence et la traçabilité des opérations dans les chaînes logistiques.
Avant tout, ces technologies renforcent les principes sous-jacents de la comptabilité carbone : exactitude, transparence et efficience dans les processus des entités.
Difficultés d’application de la comptabilité carbone
Nécessité d’une mise à jour permanente
Or, actuellement, le problème réside dans le fait que le contexte de la comptabilité carbone et des standards ESG sont en perpétuelle évolution. En effet, les facteurs sont nombreux notamment :
– les développements technologiques (outils automatisés, analyse des données via l’IA).
– les tendances des marchés
– les attentes changeantes des consommateurs
– le feedback des autres parties prenantes
– l’évolution des réglementations.
Alors, elles doivent ainsi :
– adapter leur contrôle interne ainsi que leurs processus.
– et mettre en place une stratégie d’investissement qui répondent à ces référentiels.
Le cas TotalEnergies
Par exemple, le groupe TotalEnergies s’est donné l’objectif de réduire le montant de carbone émis lors de l’extraction du pétrole brut. Et en parallèle, ce groupe s’est engagé à investir dans des énergies renouvelables telles que les énergies éolienne et solaire. A cela, TotalEnergies a décidé de consacrer 30% du montant de ses investissements, soit environ 5 milliards de dollars par an, à la production d’électricité faible en teneur carbone.
Et pourtant, lors de la célébration de son centenaire fin mai, des militants écologistes ont dénoncé les activités polluantes du groupe TotalEnergies. Le PDG Patrick Pouyanné a alors défendu la stratégie de l’entreprise comme étant équilibrée entre les énergies fossiles et renouvelables. Il a également souligné les efforts de réduction des émissions de CO2.
Fiabilité de la mesure de la réduction des émissions de CO2
En fait, il y a une pression grandissante des investisseurs et autres parties prenantes sur les organisations. En particulier, ils demandent une divulgation complète des émissions de CO2. Aussi, leur attention se fixe sur la manière dont les entités réduisent ces émissions.
Or, les organisations font face à un problème de taille : obtenir des données crédibles sur les gaz à effet de serre. Mais, il convient ici de prendre en compte notamment souvent l’absence de procédures 100% fiables pour élaborer un reporting standardisé. De surcroît, à cela s’ajoute pour les grands groupes la nature complexe des chaînes logistiques à l’échelle mondiale.
Aussi, cela a conduit les organisations à investir dans des systèmes d’information (SI) capables de collecter ces données. En particulier, ces SI visent à mettre en place des systèmes pouvant capturer les émissions GES aux différentes étapes de la chaîne logistique et à encourager les fournisseurs à en faire de même. Cependant, dans le contexte réel, il convient de prendre en considération de nombreuses limitations :
Les systèmes d’informations retracent les flux monétaires mais très peu les flux physiques. Et quand on essaie d’obtenir manuellement les bonnes données, on fait face à des difficultés organisationnelles terribles.
Les bâtiments sont-ils possédés ou loués ? Les activités de maintenance sont-elles faites en interne ou confiées à des prestataires ? Nos interlocuteurs, évoluant dans les directions développement durable et donc souvent issus du monde de la RSE, n’ont pas forcément la réponse, alors qu’elle va changer la manière de calculer l’empreinte carbone.
Hélène Chauviré, Senior manager chez Carbone 4, co-responsable de la pratique « Performance climat » Source : Usine Nouvelle
En conséquence, il existe une incertitude sur la mesure des progrès accomplis. Ainsi, une société peut très bien améliorer l’efficience énergétique de ces infrastructures, point positif. Mais d’un autre côté, elle peut tout aussi bien allonger la durée de vie de ces immobilisations gourmandes de combustibles fossiles. Aussi, dans ce cas, il paraitrait plus judicieux de connaître le montant des investissements dans de nouveaux processus consacrés à remplacer ces infrastructures énergivores.
Conclusion
La comptabilité carbone a évolué au cours des ans via les débats autour du réchauffement climatique. Tout d’abord, les normalisateurs se sont attardés sur l’impact des émissions directes sur l’environnement. Ce n’est que par la suite, ils se sont interrogés sur les effets indirects.
De ce fait, la comptabilité carbone est liée à l’émergence de normes internationales et de reporting standardisés permettant des comparaisons entre entreprises. Toutefois, il reste bien complexe de jauger dans quelle mesure les émissions de gaz à effet de serre affecte les états financiers.
In fine, bien qu’imparfaite à ce jour, la comptabilité carbone est essentielle pour bien cerner les exigences ESG requises désormais dans le reporting des organisations dans une optique de long terme.
Pour en savoir plus : Carbone4.com
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